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«Sous la pression américaine, le Polisario tente de gagner du temps»

«Sous la pression américaine, le Polisario tente de gagner du temps»

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Le Polisario a-t-il cédé aux exigences de Donald Trump en mettant de côté certaines de ses revendications ?

Pas exactement. Il ne s’agit pas d’un abandon mais d’une stratégie temporaire, principalement dictée par la pression du Conseil de sécurité. Cette instance de l’ONU est passée d’une position attentiste à une adhésion progressive au discours pragmatique du Maroc : d’abord en relativisant l’importance du référendum, puis en donnant du poids à l’option de l’autonomie, jusqu’à reconnaître progressivement la légitimité de ce projet. Dans ce contexte, la pression américaine sous Trump, soutenue par la France et le Royaume-Uni, pousse le Polisario non pas à céder, mais à gagner du temps pour sa survie politique.

Cependant, cette pression place le Polisario face à un dilemme existentiel : s’il persiste à refuser l’autonomie, il risque d’être désigné par Washington comme une organisation terroriste, avec toutes les conséquences que cela implique. Mais s’il accepte, il perd sa raison d’être. Ce tournant reflète à la fois l’incapacité persistante à imposer le référendum et le début d’une prise de conscience — non avouée car non encore assumée — de l’ampleur des transformations du dossier.

Ce tournant est-il une simple manœuvre en attendant le départ de Trump ou résulte-t-il des échecs successifs du Polisario à imposer sa position ?

Un peu des deux. D’une part, la direction du Polisario cherche à gagner du temps, comme si l’histoire pouvait être mise en pause. D’autre part, elle paie le prix de décennies d’échecs. L’impasse du référendum n’est pas un accident : c’est un échec stratégique. Plus grave encore, le mouvement n’a pas su saisir l’ampleur des changements géopolitiques en cours. Continuer à défendre l’idée d’un référendum, c’est défendre une solution obsolète, enterrée par la réalité et par la volonté du Conseil de sécurité d’aller vers un règlement basé sur l’autonomie. Et croire qu’il suffirait d’attendre la fin du mandat de Trump pour que les choses changent est une illusion : il est déjà parti durant quatre ans, et la ligne américaine sous Biden n’a pas bougé d’un iota.

Ce tournant est-il dû à une pression de l’Algérie ?

En grande partie, oui. L’Algérie reste le principal soutien du Polisario, mais elle est elle-même sous pression. À l’international, la dynamique évolue contre elle : Washington, Paris et Londres répètent que seule l’autonomie marocaine est crédible. Mais la pression la plus forte est intérieure. L’économie est fragile, la société est en tension, et de nombreux Algériens perçoivent la question du Sahara comme un fardeau coûteux.

Des voix s’élèvent, comme celle de Noureddine Boukrouh, ancien ministre de 1999 à 2005 sous la présidence d’Abdelaziz Bouteflika, pour affirmer haut et fort que cette voie est une impasse. Le problème, c’est que le régime reste prisonnier de l’héritage de Boumediene et d’une rhétorique datant de la Guerre froide. Il n’arrive pas à reconnaître publiquement une évidence : il n’y aura pas de victoire. Tout ce qui reste, c’est la possibilité d’un compromis honorable.

À votre avis, ce tournant sera-t-il accepté par les membres du Polisario ?

Tout dépend de ce que l’on entend par «membres». Si l’on parle des habitants des camps de Tindouf, la réponse est évidente : ce ne sont pas des militants, mais des populations prises en otage par un conflit sans fin. Le dernier rapport du Secrétaire général de l’ONU, publié en juillet 2025, a révélé des chiffres alarmants : 13 % des enfants y souffrent de malnutrition aiguë, un taux qui les place, selon l’OMS, à une seule marche du seuil de famine. Dans ce contexte, parler d’adhésion ou de refus n’a guère de sens : ces familles aspirent surtout à la dignité et à un avenir meilleur.

Si, en revanche, on parle des quelques membres qui continuent d’appartenir organiquement au Polisario, il faut rappeler que beaucoup ne le font plus par conviction idéologique, mais sous la pression des contraintes de la vie quotidienne, faute d’avoir pu regagner le Maroc ou émigrer vers l’Espagne. Leur «acceptation» n’est donc pas un choix politique, mais la conséquence d’un enfermement social et existentiel.





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