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Quand Kadhafi défiait Hassan II

Quand Kadhafi défiait Hassan II


Dans une manœuvre visant à renforcer le soutien politique au Front Polisario, le défunt leader libyen Mouammar Kadhafi a adressé un message au roi Hassan II le 27 février 1976, date marquant l’autoproclamation de la «République arabe sahraouie démocratique» par le mouvement séparatiste. Dans ce message, Kadhafi exprimait son opposition à ce qu’il qualifiait d’«annexion du Sahara par le Maroc», selon un document de la CIA daté de février de la même année.

Ce message s’inscrit dans un contexte régional extrêmement tendu, alors que le Maghreb connaissait de profonds bouleversements politiques. Parmi ceux-ci, l’escalade du conflit maroco-algérien, les Accords de Madrid de novembre 1975, et l’intensification des affrontements armés entre le Maroc et le Front Polisario.

Kadhafi cherchait à s’imposer comme un «leader révolutionnaire arabe» soutenant les mouvements de libération, tout en cherchant à étendre son influence dans la région et à rivaliser avec l’Algérie sur la question du Sahara.

Dans son message, Kadhafi, qui se vantait d’avoir fondé le Front Polisario, réaffirmait son engagement envers les «valeurs islamiques et nationales», tout en critiquant les revendications marocaines sur le Sahara, selon le document déclassifié et publié le 3 février 2012.

Il tentait de présenter le Sahara occidental comme extérieur au Maroc, tout en affirmant ne pas s’immiscer dans les affaires internes du royaume, précisant qu’il n’avait pas évoqué «Ceuta et Melilla, toujours occupées par l’Espagne, car cela relève de la souveraineté nationale marocaine».

Dans ce même document, Kadhafi critiquait indirectement l’Algérie sans la nommer, déclarant : «Il est à noter que les pays concernés par cette question n’ont pas coopéré avec la Libye pour armer le Front ; au contraire, ils ont confisqué des cargaisons d’armes en provenance de Libye à destination du Front.»

Initialement, l’Algérie hésitait en effet à armer le Front Polisario et avait même confisqué certaines cargaisons libyennes. Toutefois, le président algérien, Houari Boumediene, a changé la politique d’Alger, s’engageant dans une rivalité avec Kadhafi et soutenant le Front séparatiste militairement, diplomatiquement et financièrement.

Kadhafi affirmait que l’intérêt du Maroc pour le Sahara n’avait émergé qu’en 1975 : «Je déclare devant l’histoire que je ne me serais pas opposé au Maroc si j’avais cru que le peuple du Sahara, dirigé par le Front populaire, n’était pas opposé à rejoindre le Maroc. J’aurais remercié Dieu pour la fin du rôle libyen, couronnée par la fin du colonialisme sur les terres arabes.»

En mauvais termes avec la plupart des régimes arabes, notamment les monarchies, Kadhafi affirmait également avoir tenté de convaincre le Polisario de rejoindre le Maroc «après l’indépendance», qualifiant la présence marocaine au Sahara après le départ espagnol d’«extrêmement dangereuse».

«Le peuple du Sahara a dit au monde qu’ils ne sont ni Marocains, ni Algériens, ni Mauritaniens, et que les vrais fils du Sahara sont ceux qui ont pris les armes et libéré leur terre. Par conséquent, l’annexion du Sahara au Maroc est, sans aucun doute, une annexion forcée.»

Mouammar Kadhafi

Régler de vieux comptes

Dans son message, Kadhafi décrivait le déploiement des forces armées marocaines au Sahara comme «une annexion imposée par la force», estimant que «son succès ou son échec est lié à l’extermination du peuple sahraoui ou de l’armée marocaine, et les deux possibilités sont une tragédie».

Ce message était également empreint de dimensions personnelles, survenant quelques semaines après une déception vécue par Kadhafi, suite au refus du roi Hassan II de le laisser participer à la Marche verte, qui a conduit au retrait espagnol du Sahara.

Le roi Hassan II mentionne dans son livre «Mémoires d’un roi» que Kadhafi lui avait envoyé un télégramme officiel en 1975, déclarant : «En tant que révolutionnaire, je vous soutiens à mille pour cent, et je veux venir au Maroc à la tête d’une délégation libyenne pour affronter le colonialisme, notre ennemi commun.»

Le roi n’a pas répondu à cette demande. Neuf ans plus tard, lors de leur rencontre le 13 août 1984 à Oujda, Hassan II a déclaré que Kadhafi lui avait parlé gentiment, mais il était clair que le manque de réponse à ce télégramme restait un point sensible, car Kadhafi lui avait dit franchement : «Je n’ai pas compris votre refus.»

Ce ressentiment personnel, combiné aux ambitions régionales de Kadhafi, l’a poussé à adopter une position hostile envers le Maroc sur la question du Sahara, se présentant comme le principal soutien de ce qu’il considérait comme la «lutte du peuple sahraoui», dans une tentative de renforcer sa position sur la scène maghrébine aux dépens de l’Algérie et du Maroc.





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