Née à Bruxelles, la peintre et enseignante d’arts plastiques Noura Mennani est la sœur unique de trois frères. D’un père conducteur de tram et d’une mère ouvrière, elle est d’abord encouragée dans ses choix de carrière par ses parents originaires de Fès, installés en Belgique à la fin des années 1960. Lorsqu’il n’est pas wattman, le père de famille est d’ailleurs un photographe amateur et un «artiste dans l’âme», dont la plasticienne garde les souvenirs d’un premier soutien inconditionnel.
En photographie et en image, un des frères de Noura a pris la relève en devenant caméraman professionnel en Belgique pour les plateaux de films. Après un baccalauréat artistique, la peintre obtient quant à elle un diplôme de maquettiste d’architecture, de l’Institut Bischoffsheim de Bruxelles. Trois ans plus tard, elle obtient son certificat d’aptitude de professorat d’arts plastiques de la Haute Ecole Galilée.
La peintre enseigne actuellement à l’Institut de la sainte famille d’Helmet à Schaerbeek. Du 3 octobre au 2 novembre 2025, elle expose par ailleurs dans l’Escape Art Gallery de Bruxelles, dans le cadre d’une exposition collective sous le thème «Women In Art».
Le pop art, un moyen d’expression émancipatrice
Dans son entretien à Yabiladi, Noura Mennani se rappelle de son père comme étant «le premier à [lui] inculquer l’idée qu’[elle] avait exactement les mêmes chances et les mêmes possibilités que [ses] trois autres frères, y compris dans l’art, ayant été une enfant férue de dessin et de peinture depuis [ses] six ans». «Il m’a toujours dit : ‘ma fille, tu seras une grande artiste, un jour’», ajoute celle qui signe désormais l’ensemble de ses toiles par son nom de famille, en hommage à celui qui l’a toujours poussée à tracer son propre chemin.
«Je peux dire que mon père a été un grand féministe, au niveau de la famille. C’est d’ailleurs lui rendre hommage, aujourd’hui, que de montrer une autre image émancipée de la femme, comme je le fais dans mes toiles à travers lesquelles j’ai toujours voulu mettre en avant des figures féminines, quitte à m’inscrire dans un registre artistique provocateur que j’assume pleinement, à commencer par le choix des couleurs et la dimension des tableaux, mais aussi par les représentations en elles-mêmes.»
Noura Mennani
L’engouement de la peintre pour le pop art et son inspiration de ce courant s’inscrivent dans sa vision à la fois artistique et radicale de la représentation visuelle. Ayant baigné dans l’univers créatif des années 1970 et 1980, Noura Mennani découvre de plus près l’univers des artistes américains Andy Warhol et Roy Lichtenstein. «Étant très physionomiste, j’ai toujours aimé dessiner les visages et j’apprécie particulièrement faire des portraits. Les couleurs fluorescentes m’ont plu énormément», dit-elle.
Création : Noura Mennani
Grâce à sa double culture, Noura Mennani développe en effet une approche singulière dans le pop art, qui lui permet notamment de briser les codes et faire changer les perceptions en Europe. Tout en s’inscrivant dans un courant principalement occidental, elle intègre une touche méditerranéenne qui ne la fait pas tomber dans la caricature. Un combinaison artistique idéale, pour apporter une dimension esthétique qui fait mieux véhiculer son message.
Une visibilité grandissante au Maroc et ailleurs
C’est à travers cette approche que Noura Mennani a choisi de se différencier, tout en célébrant la figure féminine et en la sortant du carcan folklorique dans lequel elle reste souvent représentée, quand bien même elle serait mise en avant. «Je veux fait la part belle à la femme qui choisit d’être comme elle veut», explique la plasticienne.
En évoquant par ailleurs ses techniques de peinture, elle affirme que «tout est peint à la main». «Je reçois souvent des retours de personnes qui pensent que je fais de la sténographie. Je pends cela comme un compliment, mais en s’approchant de mes toiles, on remarque les coups de pinceau», dit-elle. «J’ai déjà fait de l’aquarelle, j’ai utilisé des feutres pour dessiner des détails plus précis. Je recours souvent à l’acrylique, car le séchage rapide me permet de créer des toiles lumineuses plus rapidement», ajoute Noura Mennani.
Depuis février dernier, l’une de ces toiles a été retenue pour rester au Maroc, après une exposition collective à la Fondation Hassan II pour les Marocains résidant à l’étranger, où Noura Mennani a montré son travail pour la première fois au Maroc.
«Je garde du pays le merveilleux souvenir d’une sublime expérience qui reste inoubliable. J’ai été positivement accueillie et j’ai eu carte blanche pour exposer les toiles que je voulais. Celle restée sur place a été choisie par le conseiller royal André Azoulay. J’en suis très honorée et cela renforce notre attachement au pays d’origine, celui nos parents et qui est le nôtre.»
Noura Mennani
Le succès prend ainsi forme sans connaître de frontières, après s’être confirmé en Europe. En Belgique, Noura Mennani a obtenu le Mérite artistique européen, une promotion des Affaires étrangères pour exposer dans tout le pays. En Italie, son trail a reçu des félicitations, tandis que l’une de ses toiles est restée à la Fondation Maison du Maroc à Paris (France). Son rêve reste d’«exposer dans un musée au Maroc». «Je crois que c’est le plus grand rêve de ma vie», affirme-t-elle.