Mardi, ses propos tenus sur la télévision publique AL24 News ont créé un tollé sur les réseaux sociaux. Le lendemain, la chaîne française RMC a officialisé la fin de sa collaboration avec Mehdi Ghezzar, chroniqueur de l’émission Les Grandes gueules. Dans une brève annonce, le média français a affirmé ne pas cautionner les déclarations de son collaborateur, bien que tenues sur les ondes d’un support étranger.
Mis en perspective, les propos de Mehdi Ghezzar viennent ponctuer un parcours politique de plus en plus inféodé au pouvoir algérien. En effet, ces dernières semaines, l’entrepreneur médiatisé a publiquement mis en avant son lobbying auprès des Algériens de France, en soutien à la réélection d’Abdelmadjid Tebboune, en septembre prochain. Début août, le concerné a donné un entretien à TSA Algérie, dans lequel il loue «l’influence» du voisin de l’Est en France. Son épouse, la journaliste Hana Ghezzar Bouakkaz, qui officie également à RMC, a précédemment tenu des propos complotistes visant à impliquer le Maroc dans la cabale contre la boxeuse algérienne Imane Khelif, lors des Jeux olympiques de Paris (JO 2024).
D’entrepreneur médiatisé à lobbyiste de Tebboune en France
Alors que le scrutin présidentiel approche en Algérie, Mehdi Ghezzar tente, à sa manière, de se faire le chantre du président sortant. «On a eu une décennie compliquée, de 2010 jusqu’à 2019, où les antennes consulaires et diplomatiques n’avaient pas fait de la diaspora une priorité», a-t-il déclaré à TSA, notant le «changement de mentalité» opéré depuis 2020. Dans cette nouvelle dynamique, la diaspora est «à part entière dans le renouveau démocratique» et dans «le renouveau du lobbying algérien».
Pourtant rien ne destinait Mehdi Ghezzar a devenir porte-voix d’Abdelmadjid Tebboune en France. En 2013, fraichement arrivé dans l’Hexagone, il a commencé son parcours d’entrepreneur dans la décoration d’intérieur de luxe. De fil en aiguille, il se diversifie en créant plusieurs entreprises, à commencer par le foncier et l’immobilier, l’automobile et la restauration. Sur son profil LinkedIn, il se décrit lui-même comme étant un «touche à tout pour tout connaître». Aujourd’hui, le nom de l’entrepreneur est rattaché à plus d’une dizaine d’activités économiques en France.
Parallèlement, Mehdi Ghezzar a officié à RMC au sein de l’équipe Les Grandes gueules, en plus d’être consultant pour la chaîne publique algérienne AL24 News. Ses rares interventions sur le Maroc et les Marocains sont passés de la fraternité au racisme sans filtre. Comme si son rapprochement avec le pouvoir algérien devait passer par alignement au discours anti-marocain devenu un mantra. Ainsi, de figure publique de la diaspora algérienne en France, l’entrepreneur a été récemment désigné représentant de Tebboune à Paris, pour la réélection du président algérien.
Une opération lobbying mobilisant politiques et religieux en France
Selon lui, ses concitoyens dans l’Hexagone s’organisent «de façon efficace» pour «rassembler toutes les forces vives», notamment par le biais du réseau diplomatique et consulaire du pays. «Depuis trois ans, nous essayons de faire un travail collectif qui se base sur l’évolution de l’Algérie à travers les yeux des étrangers», a-t-il encore soutenu.
Mehdi Ghezzar n’est par ailleurs pas la seule figure de proue du lobbying algérien de France pour la réélection d’Abdelmadjid Tebboune. Recteur de la Grande mosquée de Paris, Chems-Eddine Mohamed Hafiz a récemment été désigné comme coordinateur de cette campagne auprès de la diaspora algérienne en France. Régi par la Société des habous et lieux saints de l’islam, association de droit français, le lieu de culte se trouve malgré lui au cœur de la campagne du président sortant d’un pays tiers. Etrange mélange religion et politique dans le pays de la laïcité.
Parmi les autres noms de ce cercle de lobbying figurent aussi la maire adjointe de Marseille, Samia Ghali, outre Ali Dahmani, délégué régional de la Grande mosquée de Paris pour la région PACA, ou encore Karima Khatim, élue locale en Seine-Saint-Denis.