Lors d’une réunion de la Commission de l’éducation, de la culture et de la communication de la Chambre des représentants, mercredi 14 mai 2025, le ministre de la Jeunesse, de la culture et de la communication Mohammed Mehdi Bensaid, a défendu un cadre juridique intégré, à même d’atténuer les répercussions négatives d’un nombre d’applications numériques. Evoquant l’élargissement des prérogatives de la Haute autorité de la communication audiovisuelle (HACA) aux réseaux sociaux, il a souligné le rôle de l’État dans la protection du jeune public contre les impacts négatifs des contenus en lignes et sur les GAFA, à travers des mécanismes qui s’appuieraient sur les expériences internationales en la matière.
Selon lui, cet arsenal conférerait à l’actuel régulateur audiovisuel des pouvoirs élargis à l’activité des plateformes au Maroc, même en l’absence de siège dans le pays, si le contenu proposé est destiné au public marocain ou s’il génère des revenus auprès de celui-ci. Dans ses déclarations, le ministre a ajouté que ce cadre permettrait également à la HACA de demander au représentant légal de la plateforme de soumettre des rapports périodiques sur les mécanismes de modération de contenu, de signalement et de réponse aux plaintes et aux réclamations des utilisateurs, ainsi que des données statistiques sur les contenus supprimés ou controversés.
Réguler les plateformes numériques et imposer des outils de contrôle
Il s’agirait, en outre, d’apporter une «définition précise» d’un service de plateforme numérique ou d’une plateforme de partage de contenu en ligne (réseaux sociaux), soumettant les fournisseurs à «des obligations légales claires qui visent à structurer la relation avec l’État». Le futur cadre juridique, dit encore Bensaid, met l’accent sur la désignation d’un représentant légal sur le territoire national. Cette mesure, a déclaré le ministre, viserait notamment à combler le vide juridique qui laisse les plateformes étrangères libres d’opérer sans contrôle effectif.
Le cadre prévoit également un mécanisme pratique de sanctions, en cas de violation ou de manque de coopération avec les autorités nationales, en plus d’obliger les plateformes de réseaux sociaux à mettre en place «un système efficace de modération des contenus diffusés sur leurs services». Il s’agira d’«algorithmes qui détecteraient automatiquement les contenus illicites, notamment ceux liés à la violence, aux discours de haine, aux fausses informations ou aux messages destinés aux mineurs», a souligné Bensaid.
Concernant le jeune public, ce cadre juridique, tel que décrit par le ministre, vise à obliger les plateformes à «prendre des mesures pour protéger ces utilisateurs contre les contenus préjudiciables ou inappropriés», avec une «catégorisation par tranche d’âge, l’activation des outils de contrôle parental, l’interdiction des publicités exploitant la vulnérabilité des mineurs ou faisant la promotion de produits préjudiciables, la suppression de tout contenu susceptible de nuire aux développement psychologique ou comportemental».
Quant aux fausses informations et les contenus illicites, les plateformes numériques seront tenues de les traiter «immédiatement», encore plus en cas d’incitation à la violence, au terrorisme ou à la discrimination raciale, ethnique ou religieuse, à travers des mécanismes de suppression de contenu et en coopérant avec les autorités nationales, pour mettre en œuvre les décisions de blocage ou de restriction de la HACA.
En 2019, un projet n’avait pas vu le jour
En 2019, la question a déjà été soulevée, lorsque des informations ont circulé quant à l’élargissement des prérogatives de la HACA à la régulation numérique. Alors ministre de la Culture, Mohamed Laâraj a soutenu l’idée, en prônant de la développer dans un cadre juridique adéquat. Dans le temps également, des déclarations publiques du régulateur audiovisuel ont souvent évoqué la question des fausses informations sur Internet, au regard de l’éducation aux médias plutôt que du contrôle direct.
Dans leur essence, ces déclarations ont surtout mis l’accent sur les médias réglementés par le Code de la presse ou par la loi 77.03 sur la communication audiovisuelle, à la lumière de leur responsabilité à dimension éducative, en termes de pluralité politique ou encore d’assainissement des informations en circulation. Depuis, l’élargissement de la régulation aux contenus numériques est resté au stade de l’idée et de la réflexion, défendue par Mohamed Laâraj, sans évoluer vers un projet de loi recevable auprès du Secrétariat général du gouvernement (SGG).
Dans la suite du questionnement sur ce cadre, une source a confirmé à Yabiladi, dans le temps, qu’il serait question d’un élargissement des prérogatives de régulation de la HACA à Internet. En cas d’élaboration, un cadre juridique abordant la régulation, sous la forme d’une abrogation ou d’un élargissement, devrait être examiné par le régulateur.
Pour sa part, Mohammed Mehdi Bensaid défend un outil juridique différent de celui-ci, mais allant dans le même sens. Désormais, l’actuel ministre prône ces dispositions comme «une étape essentielle pour surmonter les barrières réglementaires en matière de souveraineté et garantir que les acteurs numériques internationaux soient responsabilisés et contrôlés», à l’image des pratiques dans la législation européenne sur les services numériques.