L’Algérie a tenté de dribbler le Maroc et la Tunisie en déposant le 18 avril dernier un dossier intitulé « Art de l’ornementation architecturale en zellige : connaissances et compétences » pour son inscription sur la liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité de l’UNESCO. Une initiative qui a suscité de vives réactions au Maroc et en Tunisie qui revendiquent également l’art du zellige. Pour rappel, le Maroc avait déposé en 2012 un dossier auprès de l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI) pour s’approprier le carreau de céramique.
Mais en réalité, qui a inventé le zellige ? Difficile de répondre à la question. Selon Jeune Afrique, cet art serait issu des tesselles de mosaïques, introduites par les Phéniciens pendant le Moyen Âge, période où le Maroc, l’Algérie et la Tunisie étaient sous l’influence des Andalous et des Turcs. « La Méditerranée est un creuset d’échanges très ancien. Pour preuve, de l’obsidienne (un minéral volcanique) qui provenait des îles siciliennes, a été trouvée sur les sites préhistoriques des pays maghrébins. Elle atteste d’échanges notamment avec les îles de la Méditerranée centrale en des temps reculés », indique un chercheur de l’Institut national du patrimoine tunisien (INP), cité par le magazine.
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Des céramologues sont unanimes pour reconnaitre au Maroc et à la Tunisie la légitimité pour revendiquer l’art du zellige. Mais dans un contexte de rupture unilatérale par l’Algérie de ses relations diplomatiques avec le Maroc et de tensions entre Rabat et Tunis, un accord entre les trois pays sur cette question de patrimoine en vue d’une revendication collective est quasi impossible. « L’appropriation abusive a presque valeur d’annexion. On nie aux autres pays leur apport, on les spolie et on se comporte comme des affamés d’identité, dont le patrimoine immatériel est l’un des marqueurs », dénonce un artisan tunisien.
Le patrimoine immatériel est source de rivalité et de désaccords entre les pays. Il transcende les questions politiques. En la matière, l’UNESCO appelle à des revendications collectives. En 2018, l’Algérie avait tenté de s’approprier le couscous. Face à l’opposition de ses voisins, elle a finalement déposé en 2020 un dossier soutenu par tous les pays du Maghreb, y compris la Mauritanie et la Libye. « La Sicile et la Sardaigne auraient pu revendiquer aussi une part de propriété sur le couscous », un plat consommé dans tout le bassin méditerranéen, renseigne le chef sicilien Antonino Grammatico, cité par Jeune Afrique.