Le décès du sultan Ahmed Al Mansour, au XVIIe siècle, avait plongé l’État saadien dans une phase de déclin, suite à la guerre fratricide menée entre ses héritiers qui aspiraient à conquérir le pouvoir. Le royaume chérifien avait ainsi été divisé en deux zones : une au sud, dont la capitale était Marrakech et une autre ayant comme chef-lieu la ville de Fès. Des guerres ont eu lieu entre les deux parties, alors que le pays sombrait dans le chaos sécuritaire, des révolutions, des mouvements séparatistes et des émirats indépendants.
En 1631, le sultan Abdelmalek Ben Zidane, petit-fils d’Ahmed Al Mansour et fils de Moulay Zidane, est tué. «Quand al-Walid s’est révolté contre son frère Abdelmalek, il est resté en mouvement dans le pays. Il a persuadé les chefs de l’État, ses figures de proue et ses marchands, et leur a promis la bienveillance jusqu’à ce qu’ils acceptent de tuer son frère», écrit Ahmed Ben Khalid Naciri, dans «Al Istiqsa fi Akhbar Al Maghrib Al Aqsa». «Alors ils l’ont guetté jusqu’à ce que les gardiens soient inconscients et sont entrés dans son dôme pour l’abattre d’une balle et le rouer de coups de couteaux.»
Après cet assassinat, les braquages et les pillages se multiplient dans le pays, en particulier dans la ville de Fès. Les Saadiens ordonnent alors la fermeture de la mosquée Al Quaraouiyine et l’interruption des prières de Tarawih.
La Nuit du destin (Laylat al-Qadr) commémorée par un seul homme
«Lorsque le sultan Abdelmalek Malik Ben Zidane, l’allégeance a été prêtée à son frère Al-Walid. Il poursuivra la politique de son père et son frère. Son autorité n’outrepasse pas Marrakech, tandis qu’à Fès, la sédition ne cesse de grandir, au point que les prières du vendredi et de Tarawih ont été suspendues de la mosquée Al Quaraouiyine pendant un certain temps», raconte «Al Istiqsa fi Akhbar Al Maghrib Al Aqsa». On raconte également qu’«un seul homme» commémorera la Nuit du destin (Laylat al-Qadr) dans ladite mosquée, «en raison de l’intensité de la terreur et des guerres qui sévissaient parmi les habitants de la ville».
À son tour, Mohammad Ben Tayib El Qadiri a expliqué, dans «Nashr al-Mathani li Ahl Al Qarn Al Hadi Aachar wa Thani», que la mosquée a été fermée «à cause du conflit», situant la fermeture avant le vendredi, 3e jour du Ramadan de cette année-là et notant que la suspension se poursuivra même après la fin du mois béni.
Le livre «Le passé et l’avenir d’Al Quaraouiyine», de Mohammad Abdelhay El Kettani a aussi évoqué cet incident. «En cette année (1040), Abdelmalek Ben Zidane, qui était appelé le calife, a été tué, et son frère al-Walid lui a succédé parmi les habitants de Fès. Les prières du vendredi et les Tarawih ont été suspendues, lorsque la situation s’est aggravée à cause de la guerre entre les habitants de Fès», écrit-il.
Le même incident est mentionné dans un autre livre de Mohammad Ben Tayib El Qadiri. «Cette année-là (…), il y avait beaucoup d’agitation, de sorte que la prière du vendredi et des Tarawih à la mosquée Al Quaraouiyine à Fès a été suspendue», écrit-il.
La lutte des Saadiens pour le pouvoir se poursuivra après cet incident. Alors que la première moitié du XVIIe siècle marquera le déclin de la dynastie, l’ère saadien prendra fin après l’assassinat du dernier sultan, Ahmed El Abbas, tué par son oncle maternel. Les Alaouites parviennent finalement à vaincre, mettre fin à la sédition et aux émirats indépendants, libérer les villes occupées et unifier à nouveau le royaume chérifien sous une même bannière.