« Enfin ! Enfin. C’est le premier mot qui m’est venu quand on a appris l’arrestation du meurtrier présumé de ma maman », souffle Dounia, 46 ans, auprès du Parisien. Elle estime que « cette lourdeur qui était dans nos cœurs depuis si longtemps s’est instantanément envolée, on va enfin avoir une réponse. » Quand l’information est tombée, Dounia dit n’avoir même pas cherché à savoir qui c’était.
« La seule chose qui m’importait, c’est que justice allait pouvoir être faite. Après 24 ans de combat, 24 ans de larmes, 24 ans d’espérance, ça y est », ajoute-t-elle. Celle dont le frère et la sœur sont décédés trop tôt pour connaître le moment de la justice, espère avoir une réponse avant sa mort.
Dounia a tenu à saluer le travail abattu par le pôle ‹cold case› : « le pôle “cold case” fait des miracles et soulage les cœurs en apportant enfin des réponses ». Mohammed C. avait été arrêté lundi 25 novembre et placé en garde à vue dans les locaux des gendarmes de la section de recherches de Grenoble en raison de la présence de son ADN sur les lieux du meurtre de Leïla. Après la levée de sa garde à vue vendredi matin, il a été présenté à un juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Dijon, qui l’a placé en détention, dans l’attente de son transfèrement à Nanterre. Lundi, l’ancien ouvrier chez Renault a été mis en examen et placé en détention provisoire par un juge d’instruction du pôle cold-case du tribunal de Nanterre.
À lire :Cold cases : un retraité marocain mis en examen pour deux homicides en Isère
Dounia connaissait le retraité marocain. « Malheureusement, on a grandi à côté du meurtrier (7 km séparaient les domiciles de Leïla et de Mohammed C.). De Bourgoin-Jallieu à Saint-Quentin-Fallavier, tout le monde se connaît, surtout au sein de notre communauté marocaine. Je connais les filles de Mohammed, ma mère connaissait son ex-femme. On se voyait dans les mariages, les anniversaires… Par contre je n’aimais pas côtoyer cet homme. Je l’évitais, il ne me rassurait pas. Il me faisait même peur », raconte-t-elle. La fille de Leïla était à mille lieues d’imaginer que Mohammed C. serait le meurtrier présumé de sa mère.
« Je le trouvais bizarre. Son regard, son comportement, sa manie de suivre les filles, de proposer de les raccompagner en voiture… J’ai toujours refusé de monter dans sa voiture, il m’effrayait. Même si Mohammed faisait peur, personne n’a pu concevoir une seconde qu’il tue plusieurs fois. Violeur, peut-être, mais pas ça ! C’est un barbare. Est-ce qu’on a un Nordahl Lelandais puissance dix ? », poursuit-elle. Elle se pose mille et une questions : « Elle (Leïla) s’est toujours battue pour ses enfants. Elle était connue dans le quartier pour se promener avec ses sacs de course dans un petit chariot. D’ailleurs, Mohammed C. l’avait abordée plusieurs fois en se proposant de la véhiculer. Est-ce qu’elle a fini par monter dans sa voiture, est-ce qu’il l’a forcée ? »
À lire :Isère : deux cold cases ressurgissent du passé, un Marocain interpellé
Dounia ne veut pas du pardon de Mohammed : « Je ne me rabaisserai pas à lui montrer notre douleur. Il y a 24 ans, il nous a vus pleurer. On ne peut attendre aucun pardon d’un monstre qui n’a jamais eu aucune empathie. Ma mère devait investir dans des appartements pour nous mettre à l’abri financièrement. Finalement, quand j’avais à peine la vingtaine, j’ai dû travailler pour nourrir mes frères et sœurs quand d’autres allaient voyager, profitaient de la vie… Mohammed C. a bousillé nos vies. »