Le succès de la médiation marocaine entre la Chambre des représentants et le Haut Conseil d’État libyen, après avoir accueilli une réunion consultative entre les représentants des deux instances mercredi et jeudi derniers à Bouznika, parvenant à un accord sur la phase préparatoire du processus électoral, a provoqué la colère du responsable au sein du ministre libyen des Affaires étrangères, Taher Al-Baour, connu pour sa proximité avec l’Algérie.
Le chargé d’affaires a écrit au ministre marocain des Affaires étrangères, M. Nasser Bourita, pour lui exprimer sa «grande surprise» de voir «le Royaume du Maroc accueillir une session de dialogue entre un certain nombre de membres de la Chambre des représentants et du Conseil suprême de l’État», sans «aucune coordination préalable ni respect des procédures diplomatiques habituelles pour de telles réunions».
Le responsable libyen a appelé le chef de la diplomatie marocaine à «la nécessité d’une coordination préalable avec le ministère libyen des Affaires étrangères pour la tenue de toute réunion entre les parties libyennes au Maroc, afin d’éviter toute perturbation des efforts pour parvenir à une solution pour une paix et une stabilité durables, en coordination avec la Mission d’appui des Nations Unies en Libye».
Le Haut Conseil d’État libyen réagit
Le Haut Conseil d’État en Libye, institution exécutive et organe consultatif créé après l’accord de Skhirat sous les auspices des Nations unies pour mettre fin au conflit et à la division politique, a publié une déclaration exprimant sa «profonde surprise face à la déclaration du ministère des Affaires étrangères du gouvernement d’union nationale sortant».
Le Conseil a expliqué que les sessions de dialogue à Bouznika ont été tenues à la «demande des membres des deux chambres après la première réunion qui les a rassemblés dans la République sœur de Tunisie le 28 février 2024, et la deuxième réunion qui s’est tenue dans la République sœur d’Égypte le 18 juillet 2024».
Le Conseil a souligné que «l’exigence faite au Maroc d’une coordination préalable avec le ministère des Affaires étrangères du gouvernement d’union nationale avant la tenue de toute session de dialogue est une ingérence flagrante dans les affaires des deux chambres et reflète une méconnaissance des limites de l’autorité exécutive et une ignorance du principe de séparation des pouvoirs qui exige une reddition des comptes, notant que le Conseil est un organe législatif indépendant qui établit l’autorité exécutive et ne relève pas de son autorité».
«Le rôle du ministère des Affaires étrangères est de créer les conditions et de fournir des services aux membres de l’autorité législative à l’intérieur et à l’extérieur du pays chaque fois qu’ils décident de le faire conformément aux ordres qu’ils ont donnés, et le ministère n’a pas le droit de s’opposer à leurs actions.»
Haut Conseil d’État libyen
Le Conseil a tenu à exprimer «ses sincères remerciements au Royaume du Maroc, au Roi, au gouvernement et au peuple, pour les efforts visant à rapprocher les points de vue entre les Libyens et résoudre la crise libyenne».
Dans le même sens, le Comité de coordination des réunions conjointes entre les membres de la Chambre des représentants et du Conseil suprême de l’État a publié un communiqué indiquant que les membres des deux organes «n’ont besoin de l’approbation de personne pour se réunir dans tout lieu qu’ils jugent approprié, que ce soit à l’intérieur ou à l’extérieur du pays. Il a été décidé que la prochaine réunion aura lieu à l’intérieur du pays, à Derna (en Libye, ndlr), si les conditions de sécurité sont réunies pour qu’elle se déroule sans obstruction ou interférence».
Il convient de noter que le ministre libyen des Affaires étrangères, Taher Al-Baour, est connu pour être proche de l’Algérie. Il tient des consultations régulières avec son homologue algérien Ahmed Attaf, et son gouvernement est impliqué dans le projet d’union maghrébine, avec l’Algérie et la Tunisie, à travers lequel le président algérien Abdelmadjid Tebboune tente d’isoler le Maroc de son voisinage maghrébin.