Le parc national d’Ifrane est l’attraction touristique du moment, attirant les Marocains en recherche de dépaysement et de nature. Hiver comme été, les paysages à couper le souffle de ce parc en font une halte bienvenue. En effet, la région dispose d’équipements de sports d’hiver comme la station de Michlifen.
Ce site occupe la partie occidentale du Moyen Atlas. Créé en 2004, sur une superficie de 51 800 hectares, le parc national d’Ifrane s’étend sur les provinces d’Ifrane et Boulemane et est la continuation «spatiale» du parc national de Khénifra. «Les frontières des deux parcs s’épousent et sont imbriquées. Le but est la protection et la conservation de la cédraie, plus précisément le cèdre de l’Atlas et le singe magot», déclare à Yabiladi Sidi Imad Cherkaoui, ornithologue et professeur à l’université Moulay Ismail.
«Le site du parc constitue un véritable château d’eau. Les lacs naturels permanents Dayet Aoua et Aguelmam Afennourir, les sources, les rivières, constituent ses entités paysagères majeures», lit-on sur le site d’échange d’information sur biodiversité du Maroc. Par ailleurs, 37 espèces de mammifères et 140 espèces d’oiseaux ainsi qu’une trantaine d’espèces d’amphibiens et de reptiles y vivent. «Des espèces d’oiseaux migrateurs font du lac d’Afennourir, zone humide classée site Ramsar, un lieu d’escale important dans leur migration», ajoute la même source. Selon l’ornhitologue, une population importante de Tadorne Casarca, une espèce de canard vit sur le site, «près d’un millier», ajoute-t-il.
La grèbe à cou noir qui vit sur le parc national d’Ifrane. / Ph. DR
Aguelmames et Dayas
Outre la conservation de l’écosystème, le parc national est érigé pour «développer un programme d’éducation environnementale, de valoriser l’écotourisme comme une alternative génératrice de revenus locale ainsi que la valorisation des ressources naturelles et bien-sur le développement durable des systèmes de production liés à cette valorisation», indique Sidi Imad Cherkaoui.
Le parc national d’Ifrane est riche de plusieurs zones classées zone Ramsar, «comme Aguelmame Afennourir qui figure parmi les premiers sites Ramsar, en 1980. Il y a aussi l’Aguelmame Sidi Ali», précise le professeur. Une concentration importante de dayas (lacs arctiques, ndlr) sont disséminés un peu partout dans le site «comme dayet ifrah, dayet iffer, dayet Hachlaf», déclare notre interlocuteur.
«La beauté de ce paysage cache une réalité triste», confie Sidi Imad Cherkaoui, le parc est une «zone d’élevage extensif du bétail, notamment les moutons et aussi l’extension de l’arboriculture, la culture des pommiers principalement». Cette dernière «affecte les ressources en eau phréatique qui sont déjà en diminution à cause des sécheresses récurrentes accentuées par les effets des changements climatiques», regrette le professeur à l’université Moulay Ismail.
Ph. Sidi Imad Cherkaoui
Dayat Aoua, dont le paysage est riche, est une zone récréative très prisée par les familles en grand nombre. «L’année dernière, pendant l’été, la Daya était asséchée», continue notre interlocuteur. La régression de la période d’enneigement et l’insuffisance des précipitations font que les dayas sont menacées.
Ce n’est pas la seule contrainte que rencontre le site, puisque beaucoup de famille vivent à l’intérieur du parc, et ont des cheptels, ils ont besoin de couper les arbres. «Durant la période hivernale il y a une demande accrue du bois de feu, ce qui impacte les ressources forestières, notamment le cèdre et le chêne vert», indique Sidi Imad Cherkaoui.
La cellule de gestion du parc essaie de résoudre ces contraintes avec des représentants de la société civile. «Cela n’empêche pas que l’objectif est loin d’être atteint», s’insurge le professeur. En plus de la pression du pâturage, «près d’un millier de têtes de cheptel qui impactent le couvert forestier, et celui de la végétation». A Asnourir par exemple, «la végétation est rase, à cause de l’impact des cheptels».
Sidi Imad Cherkaoui indique qu’une pratique ancestrale devrait être davantage mise en avant, celle des Agdals, des zones de terres protégées de manière communautaire.
«Les tribus amazighes de la région se décident de laisser la portion de la terre intacte, c’est-à-dire que les cheptels n’y pénètrent pas pendant plusieurs années, pour qu’elle puisse se restaurer. Ils y reviennent plus tard. C’est un système de rotation.»