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Le drame de Mahbès du 14 octobre 1979, chronique d’une agression polisarienne  


En août 1979 et après une guerre ayant duré plus de trois ans et demi face aux guérillas du Front Polisario, la jeune armée de la Mauritanie rend les armes, décidant de se retirer de la partie sud du Sahara qu’elle contrôlait, conformément aux accords de Madrid du 14 novembre 1975. Le Maroc prend ainsi la décision de couper l’herbe sous le pied du mouvement séparatiste et de l’Algérie : le 14 août 1979, le Maroc annonce l’annexion de l’ancien territoire mauritanien, soit la région d’Oued Ed-Dahab.

Mais le retrait de la Mauritanie ne fera qu’aggraver les problèmes de l’armée marocaine au Sud. Les guérillas du Front Polisario concentrent alors leur offensive contre la partie qu’administrait le Maroc à l’issue de l’accord de Madrid (1975). Et, faut-il le reconnaître, le Polisario enregistrera durant cette époque quelques succès militaires occasionnels. Cela lui permet aussi d’infliger des pertes aux forces marocaines.

Plusieurs batailles se tiendront alors, dont celle de Smara des 7 et 8 octobre 1979. Elle sera même «la plus spectaculaire» avec «un aspect politique important», comme le rapporte Raoul Weexsteen dans un article intitulé «La question du Sahara occidental 1978-1979». «Les combattants sahraouis réussissent â pénétrer dans la ville et libèrent 700 civils qu’ils emmènent avec eux lors de leur repli et qu’ils présentent à la presse internationale, les semaines suivantes, regroupés dans un camp à part», raconte-t-il. En réalité et selon la version marocaine, ces civils seront kidnappés par le Polisario et deviendront des séquestrés à Tindouf.

Signature de l'accord de paix entre Bachir Mustapha Sayed (Polisario) et le Lieutenant Ahmed Salem Ould Sidi (Mauritanie), le 05 août 1979 à Alger. / Ph. AFPSignature de l’accord de paix entre Bachir Mustapha Sayed (Polisario) et le Lieutenant Ahmed Salem Ould Sidi (Mauritanie), le 05 août 1979 à Alger. / Ph. AFP

Des soldats marocains attaqués dans leur sommeil à Mahbès

En fait, les séparatistes avaient, la veille, lancé une attaque contre Zag, pour faire diversion. La bataille de Smara est alors l’une des plus violentes, chacune des deux parties affirmant avoir tué 1 000 personnes du camp adverse. Le Maroc réussira finalement à repousser les séparatistes.

Seulement, pendant leur repli vers l’Algérie voisine, des mercenaires du front séparatiste avaient une autre cible : la garnison de Mahbès et ses 1 200 hommes du bataillon d’infanterie en poste depuis quatre ans déjà. Le dimanche 14 octobre à 6 heures, ils sont alors attaqués dans leur sommeil avec des tirs de différents calibres, comme le rapporte l’édition du dimanche 28 octobre 1979 du journal espagnol El Pais. Les défenseurs des FAR occupant la première ligne tomberont en quelques minutes. «Leurs corps, criblés, certains en état de décomposition avancée, reposent toujours au même endroit où ils sont tombés, neuf jours plus tard», décrit le journaliste venu sur place. Car, pour immortaliser l’horreur, l’Algérie mobilise des journalistes et des correspondants de presse occidentaux accrédités à Alger pour se déplacer à Mahbès.

Les mercenaires du Polisario «nettoieront complètement toutes les lignes de défense en six heures ; quatre heures de plus suffiront pour mettre fin à toute résistance sur le périmètre de Mahbès». Le lendemain, soit le 15 octobre, la journée «sera consacrée au suivi des environs, à la recherche de ceux qui ont réussi à s’échapper». Mahbès est alors érigé en cimetière à ciel ouvert. El Pais décompte «132 cadavres de soldats marocains, dont plus de la moitié entassés au fond des tranchées alors que d’autres sont dispersés dans toute la ville». Le Polisario revendiquait «767 Marocains tués» alors que le Maroc, via son ministère de l’Information, déplorait la disparition de 350 personnes. Des corps de jeunes soldats, dans un «spectacle insoutenable et une puanteur effrayante», décrit-on.

Le mouvement séparatiste, parrainé par l’Algérie, ira même jusqu’à présenter 53 prisonniers marocains à la presse internationale au lendemain de la bataille ayant opposé, selon El Pais, 600 à 1 200 soldats marocains à 2 000 à 4 000 combattants. Le Maroc aurait perdu, selon El Pais, «un bataillon et quatre cents tonnes d’armes» dans cette bataille.

Des armes du Polisario saisies par les FAR en 1981 au Sahara. / Ph. Laurent Maous - G.I.Des armes du Polisario saisies par les FAR en 1981 au Sahara. / Ph. Laurent Maous – G.I.

Le siège de Zag et le début de la victoire du Maroc avec le Mur des Sables

De plus, à en croire Le Monde du 26 octobre 1979, «les forces royales [qui] se seraient repliées sur Zag, à 70 kilomètres au nord, en territoire marocain, auraient été durement accrochées, le 15 octobre, par des unités sahraouies qui avaient pour mission d’empêcher l’acheminement de renforts».

«La garnison de Mahbès aurait dû, dans la stratégie marocaine, empêcher les infiltrations du Polisario à l’intérieur du Sahara», poursuit le journal. Une mission qu’elle échouera à remplir.

De plus, moins d’un mois après cette tragique bataille, les éléments polisariens, avec le soutien militaire de l’Algérie et de la Libye, parviennent à assiéger Zag. Une attaque directe échoue le 6 décembre avant qu’un avion marocain soit abattu.

Ce n’est qu’en mai 1980 que le siège sera levé à l’issue de la première et seconde bataille de l’Ouarkziz, opération baptisée «Iman» par le Maroc. Les FAR signeront une série de victoire contre le Polisario et parallèlement, avec l’assistance de techniciens français, d’experts israéliens et une aide financière saoudienne, le Maroc procède, dès la même année, à la fortification militaire de lignes de dunes dans une perspective défensive.

Il construit ainsi, en six étapes, un mur des Sables. «Entreprise pour inverser le rapport de forces sur le terrain par les FAR, la fortification s’étale sur plusieurs années avec l’aménagement de lignes successives, dont la première ceint le triangle Bou Craa-Smara-Boujdour», écrit Karine Bennafla dans son article «Les frontières mouvantes du Sahara occidental», paru dans la revue «L’Espace Politique» en 2013.

Le mur permettra non seulement de prévenir des incursions du Polisario dans le sud du royaume, mais aussi de «transformer les modalités de la guerre».





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