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L’autorégulation, l’outil «le plus approprié» à la profession selon le CNDH

L’autorégulation, l’outil «le plus approprié» à la profession selon le CNDH

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Le projet de loi 26.25 portant réorganisation du Conseil national de la presse (CNP) a divisé, à tel point que le Conseil national des droits de l’Homme (CNDH) fait état d’une «polarisation» des points de vue. Son mémorandum sur cette réforme fait suite à une saisine du président de la Chambre des représentants. Dans ce document de 46 pages, l’institution affirme avoir «tenu à permettre à toutes les organisations d’exprimer leurs opinions et leurs points de vue, conformément à son rôle d’institution nationale pluraliste et indépendante», en phase avec «son mandat de défendre et de protéger les droits et libertés humains et d’assurer leur plein exercice, dans le plein respect des références nationales et universelles en la matière».

Le principe d’autorégulation reste l’un principaux sujets de cette polarisation, depuis les premières phases du débat sur le projet de loi. Sur ce point, le CNDH prône une «réduction de l’intervention législative et la promotion de l’autorégulation». Il réaffirme que la question d’une loi spécifique réglementant l’exercice de la liberté d’expression dans le domaine de la presse et de l’édition «ne doit pas être considérée comme une donnée acquise ou figée, mais plutôt comme un élément évolutif en fonction du niveau de développement» de la pratique de cette liberté, ainsi que des transformations connexes.

Depuis les premières phases de l’élaboration du projet de loi, le renforcement de l’autorégulation a été un point saillant parmi ceux ayant créé la discore. Depuis des mois, la Fédération marocaine des éditeurs de journaux (FMEJ) a déploré un recul contradictoire avec l’esprit de la Constitution, ainsi qu’avec «la position générale exprimée par le corps professionnel et la majorité des instances de défense des droits humains, des organisations syndicales et politiques».

Parmi elles figurent la Fédération nationale du journalisme, de l’information et de la communication (FENAJIC) affiliée à l’Union marocaine du travail (UMT), ou encore le Syndicat national de la presse marocaine (SNPM), ainsi que la Confédération démocratique du travail (CDT), l’Union des petites entreprises de presse (UPEP), en plus d’initiatives conjointes avec la Fédération marocaine des médias (FMM).

Ce propos est d’ailleurs loin d’être spécifique au contexte national du Maroc. Faisant référence à des expériences législatives comparatives en la matière, le CNDH souligne en effet qu’à travers le monde, les pays sont de plus en plus nombreux à «s’orientent vers une réduction du recours aux lois nationales réglementant la presse et l’édition», pour privilégier un outil considéré «plus approprié» à la régulation, à savoir le «renforcement des mécanismes d’autorégulation de la profession».

Par ailleurs, l’institution affirme que «la liberté d’opinion et d’expression reste directement soumise aux conventions internationales pertinentes, sans qu’il soit nécessaire d’adopter une législation interne susceptible d’entraîner des restrictions injustifiées à ce droit».

L’autorégulation, un outil à même de repenser la liberté d’expression

Plus qu’un simple un outil de circonstance, l’autorégulation de la presse et de l’édition détend même sur la pratique de la profession, dans ce qu’elle revêt comme dimensions de liberté d’expression et de devoir d’informer, en phase avec les normes éthiques. Renforcer l’autorégulation s’avère ainsi être plus en phase avec l’évolution de la notion des libertés, du point de vue juridique et conventionnel international, mais aussi constitutionnel.

Dans ce sens, le CNDH explique que «les transformations rapides liées au développement des communications et des technologies de communication ont conduit à l’émergence de nouvelles formes d’exercice de la liberté d’expression». Celle-ci «ne se limitent plus au journalisme traditionnel, mais s’étendent aux médias et plateformes numériques, devenus des acteurs majeurs du débat public et de la formation de l’opinion publique».

Ces évolutions, affirme que le CNDH, rendent donc «nécessaire de dépasser le concept traditionnel de ‘liberté de la presse’ aux horizons limités, pour s’orienter vers celui de ‘liberté des médias’, au contenu plus large, qui englobe diverses formes d’expression modernes et leur permet d’être encadrées selon des règles professionnelles et éthiques, conformes aux normes internationales pertinentes».

Par conséquent, l’institution estime que «le renforcement de la liberté d’expression dans le modèle démocratique émergent de notre pays exige de renforcer les mécanismes d’autorégulation des médias, de réduire le champ du contrôle législatif direct et de concevoir des mécanismes adaptés, pour accompagner les rapides transformations technologiques».

La réflexion que propose le CNDH sur le caractère entoilé de ces questions amène même à repenser les poursuites contre les journalistes en vertu du Code pénal. A ce titre, il souligne que cet usage «comporte de multiples risques, d’autant que certaines dispositions pénales constituent, en elles-mêmes, une restriction à la liberté d’expression et que renvoyer directement les résultats du travail journalistique au Code pénal rend difficile la distinction entre ce qui relève de la liberté d’expression et ce qui est considéré comme un acte criminel».

Par la même occasion, l’institution souligne la nécessité d’un «examen attentif» de la notion d’«ordre public». L’objectif sera d’«éviter toute interprétation contradictoire par le pouvoir judiciaire, et d’adopter le principe constitutionnel selon lequel la liberté est la règle et les restrictions l’exception, tout en soulignant que les restrictions doivent être limitées, interprétées de manière restrictive et justifiées de manière convaincante dans une société démocratique».

Les conventions internationales, la Constitution et les recommandations de l’IER

Par ailleurs, le Conseil s’est saisi de la question de la diffamation. Il a recommandé d’abroger les lois pénales en la matière, en les remplaçant «par des lois civiles conformes aux normes internationales». En effet, le mémorandum considère que la législation sur cette question «devrait refléter l’importance d’un débat ouvert sur les questions d’intérêt public et reconnaître que les personnalités publiques sont plus exposées aux critiques que les autres citoyens».

Ainsi, «la charge de la preuve de la fausseté des déclarations incombe au plaignant et la simple expression d’une opinion ne devrait pas constituer un motif de responsabilité», estime le CNDH. Il recommande également que «les sanctions civiles soient proportionnées au préjudice réel, n’aient pas d’effet dissuasif sur la liberté d’expression et excluent la possibilité pour les organismes et institutions publics de recourir à des poursuites en diffamation».

Les termes de ce mémorandum et ses observations sont puisés dans un référentiel fondé sur les termes des conventions internationales ratifiées par le Maroc, dont l’article 19 relatif au droit à la liberté d’opinion et d’expression, tel que prévu par le Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Le CNDH se réfère aussi aux principes de la Constitution de 2011 qui a intégré ces termes, mais aussi les jurisprudences internationales et régionales, européennes et africaines, outre les recommandations de l’Examen périodique universel (UPR) de 2022 au gouvernement marocain concernant la liberté de la presse.

Comme le rappelle le CNDH, l’UPR de 2022 a préconisé notamment «l’obligation de s’abstenir de cibler les femmes journalistes en raison de leur travail et de garantir un environnement sûr qui leur permette d’exercer leurs fonctions sans crainte de représailles». Il a aussi insisté sur la révision du cadre juridique régissant la liberté d’expression et de la presse au Maroc, en modifiant les dispositions qui imposent «des restrictions injustifiées», outre «l’harmonisation de la législation nationale avec les obligations internationales».

Dans son mémorandum, le CNDH s’est également inspiré de diverses expériences comparatives en matière d’organismes d’autorégulation de la profession. Il rappelle aussi des recommandations de l’Instance équité et réconciliation (IER), quant au renforcement des garanties pour l’exercice du droit à la liberté d’opinion et d’expression, avec «la nécessité d’une constitutionnalisation explicite du contenu des droits et des libertés fondamentaux, au premier rang desquels figure la liberté d’expression, avec une protection adéquate contre toute fluctuation législative, réglementaire ou administrative».

Pas de «quatrième pouvoir» sans un modèle économique viable

Sur le fond, le CNDH a mis ces principes en interaction même avec les réalités et les contraintes du secteur au niveau national, y compris sur le plan économique. Dans ce sens, le Conseil note que le renforcement du droit à la liberté d’opinion et d’expression «ne se limite pas à l’élaboration du cadre juridique du journalisme et des médias, mais il nécessite également de relever les défis liés au modèle économique des entreprises journalistiques».

En d’autres termes, le CNDH considère que «permettre à ces entreprises de renforcer leur indépendance et leur pérennité est une condition préalable pour qu’elles puissent remplir leur rôle de véritable quatrième pouvoir dans le modèle démocratique et relever les défis posés par la révolution technologique, ainsi que l’impact de celle-ci sur la pratique journalistique».

Par ailleurs, le CNDH a dressé une série d’autres recommandations, notamment sur «la clarification de la nature juridique du Conseil national de la presse», la «consolidation de l’indépendance institutionnelle et fonctionnelle de l’institution», avec un «séparation entre les organes de gestion fonctionnels et celle de l’arbitrage en matière de déontologie», outre «le renforcement de l’équilibre dans la composition» au regard de la représentativité des éditeurs, des journalistes, des hommes et des femmes.

Le conseil préconise, en outre, la mise en place d’un mécanisme d’intervention d’urgence en cas de violations graves, avec le «renforcement du cadre de protection des droits constitutionnels des journalistes, notamment en ce qui concerne l’autorité disciplinaire du CNP, avec des garanties du respect des principes de proportionnalité, de nécessité et de progressivité».





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