Le juge de référé au tribunal administratif de Montreuil (Seine-Saint-Denis) a ordonné récemment la suspension de l’arrêté interdisant à un technicien aéroportuaire d’Air France de travailler pendant les Jeux olympiques de Paris (JO 2024). D’origine marocaine, le salarié opérant à Roissy-Charles-de-Gaulle s’est en effet vu retirer son habilitation, malgré une enquête administrative favorable. La préfecture de police a évoqué des liens présumés avec «l’environnement» islamiste, ce que la juridiction a jugé être sans fondements caractérisés. Le verdict sur le fond du dossier devrait être rendu dans les prochains mois.
Relatée par Mediapart, l’affaire remonte au 11 juillet dernier. Ce jour-là, l’homme de 40 ans a été notifié par écrit du retrait de son habilitation d’accès à l’aéroport Roissy, pour une durée de deux mois. Travaillant pour la compagnie aérienne française depuis 13 ans, il est chargé de la maintenance des cabines des avions depuis 2016. Dans le cadre de ses fonctions, cette habilitation lui permet d’opérer dans les zones réglementées de l’aéroport. L’enquête administrative a permis de la renouveler pour la troisième fois.
Mais de son côté, la préfecture a justifié cette suspension par le «niveau élevé de la menace terroriste» lors des JO. Selon l’arrêté, «la moralité et le comportement» du concerné «ne représentent pas les garanties requises au regard de la sûreté de l’Etat», outre sa «sympathie» pour l’association BarakaCity, dissoute en 2020 pour «propagande islamiste».
Les éléments ne permettent pas d’expliciter les relations alléguées, selon le tribunal
Se voyant condamné sans être jugé, le salarié pose les trois semaines de congés qui lui restent, afin de continuer à percevoir son salaire et payer ses charges. Il prévoit de se mettre en congé sans solde, pour le reste de la durée de suspension. Le 25 juillet, il saisit la justice administrative à travers son avocate Me Marion Ogier. «A quelques minutes de l’audience en référé-liberté, mercredi 14 août», il découvre «à la lecture du mémoire en défense de la préfecture de police de Paris les faits qui lui sont reprochés», rapporte la même source.
Est évoquée également «une note blanche» des services de renseignement, concernant «un premier signalement» dont l’homme «aurait été l’objet en 2015, soupçonné d’actes de sabotage». Un second, en avril 2022, est survenu après qu’il a été «surpris par des collègues en train de prier sur son lieu de travail». Le concerné réfute, assurant n’aller qu’«occasionnellement» à la mosquée et ne prier ni chez lui, ni dans l’espace professionnel.
En audience, Me Ogier a pointé «le flou de certains arguments de la préfecture de police, notamment son appartenance à un environnement en lien avec la mouvance islamique». Par ailleurs, elle affirme qu’«il n’a jamais eu de liens avec BarakaCity», d’où l’impératif de «distinguer le cercle directeur de l’association et la dizaine de milliers de personnes qui ont fait un don». Pour sa part, le salarié a fourni des attestations de collègues, confirmant l’absence d’attitude de «prosélytisme, politique ou religieuse».