Le Centre d’art contemporain indépendant et maison d’éditions Kulte organise une soirée en hommage posthume à la documentariste franco-marocaine Dalila Ennadre, mercredi 14 mai à Rabat. L’œuvre de la réalisatrice décédée en 2020 sera commémorée en présence de sa fille, la comédienne Lilya Ennadre, avec d’autres intervenants, proches et anciens collaborateurs, de la défunte. Annonçant le programme, les organisateurs prévoient également des hommages vidéo, ainsi que la projection d’un documentaire rarement montré au Maroc.
Sorti en 2008, «J’ai tant aimé» met en avant Fadma, une femme marocaine recrutée par l’armée française pour servir de prostituée en Indochine, auprès des officiers français et des tirailleurs marocains. Devant la caméra, elle raconte elle-même son vécu.
A la fin de la première moitié du XXe siècle, l’Asie du Sud-est fait partie justement des régions déchirées par les guerres de décolonisation. De 1946 à 1954, la guerre d’Indochine fait des centaines de milliers de victimes. Dans ce combat pour l’indépendance, ce ne sont pas uniquement les terres et les esprits qui ont été colonisés par la France, mais aussi les corps des femmes.
Issues des contrées locales ou ramenées des colonies africaines de l’armée française, toutes auront servi en tant que prostituées dans les «Bordels militaires de campagne» (BMC), souvent mitoyens aux casernes. Dans «J’ai tant aimé», Dalila Ennadre réussit une immersion intimiste mais jamais voyeuriste, dans cet univers enfin raconté par les femmes qui y ont vécu, comme Fadma.
Dans le cadre de l’hommage consacré à la réalisatrice, deux films supplémentaires seront rendus disponibles aux présents, à avoir «Je voudrais vous raconter» (2005) et «Des murs et des hommes» (2014), qui met en avant les sans-voix de la médina de Casablanca, lieu de naissance de Dalila Ennadre.