La province de Tétouan serait une nouvelle mine d’or qui renseignera longtemps sur l’Histoire ancienne du Maghreb, en lui apportant des éléments nouveaux. Sur le site de Kach Kouch, près d’Oued Laou des archéologues ont en effet mis au jours ce qui serait le premier village protohistorique de la région, avant l’arrivée des Phéniciens. Selon l’étude publiée ce lundi sur la revue scientifique Antiquity, la présence humaine sur les lieux daterait des périodes entre 2200 et 2000 av. J.-C. jusqu’au VIIIe et VIIe siècles av. J.-C.
Menée par le professeur Youssef Bokbot de l’Institut national des sciences de l’archéologie et du patrimoine (INSAP), l’équipe de recherche fournit des preuves scientifiques qui déconstruisent certains éléments historiques sur le développement des sociétés en Afrique du Nord, bien avant le règne phénicien.
Un mode de vie localement ancré
En effet, les architectures dont les restes ont été découverts sur place suggèrent une forme de vie sédentarisée et d’organisation sociale, gérée sur le temps long autour d’activités économiques locales. Malgré leur qualité de conservation variable, les vestiges concernés par les fouilles archéologiques ont d’ailleurs permis de dégager trois périodes sur le site. Selon l’étude, la première est celle entre 2200 et 2000 av. J.-C., la seconde s’étend de 1300 à 900 av. J.-C., tandis que la troisième se situe entre les VIIIe et VIIe siècles av. J.-C.
Restes végétaux de Kach Kouch / Ph. G. Pérez-Jorda
En fonction de la datation, la seconde période aurait connu l’émergence d’habitats structurés, parallèlement à des activités agricoles. La troisième phase serait marquée par l’introduction et la diffusion d’éléments culturels extérieurs, dont phéniciens, à l’image des outils en fer et de la poterie. Selon la même source, d’autres traces sur le site donnent des indices sur le degré d’organisation sociale poussée des habitants de l’époque, qui auraient notamment constitué des stocks alimentaires et des procédés de conservation à cet effet.
Les analyses menées par les chercheurs à ce sujet montrent en effet des usages agricoles portés sur la culture céréalière et de légumineuses, ainsi que le développement de l’olivier, ou encore l’élevage de moutons et de chèvres, ou un peu moins de porc.
Outils de meulage et objets métalliques de Kach Kouch / Ph. M. Radi
Une première étude qui donnerait lieux à des recherches approfondies
Tout en mettant en avant le caractère inédit de ces trouvailles, les chercheurs notent que les conclusions de cette première étude tiennent compte des données scientifiques jusque-là limitées, concernant l’âge du bronze. Dans ce sens, ils soulignent que des éléments plus fournis à ce titre permettraient «une évaluation plus complète de l’étendue de cette occupation du deuxième millénaire avant J.-C.». Toujours est-il que «l’existence de Kach Kouch suggère fortement un paysage plus complexe qui reste à découvrir», écrivent-ils.
«Des recherches plus approfondies sur le troisième millénaire avant J.-C., reliant le Néolithique final du nord-ouest du Maghreb identifié à Oued Beht à l’âge du Bronze qui émerge actuellement à Kach Kouch, sont impératives», insistent encore les chercheurs.
Pour eux, la publication des «données de ce site unique» devrait «stimuler l’intérêt et encourager de nouvelles recherches» sur «une période charnière longtemps négligée et sous-estimée».