Tous les couvre-chefs seront-ils interdits dans l’ensemble des fédérations françaises de sport ? C’est pour le moins une proposition de loi que le Sénat examine, dès ce mardi, partant du principe de la neutralité. Si le texte concerne l’ensemble des signes religieux, la question du port du voile reste particulièrement des plus saillantes. Auteur de la proposition en mars 2024, le sénateur Les Républicains Michel Savin prône en effet de préciser le «flou juridique» qui se pose, lors des compétitions, notamment par rapport au «port du voile, qui n’est pas explicitement interdit».
Le texte sera d’abord examiné à la Commission de la culture, de la communication, de l’éducation et du sport. Le rapporteur, Stéphane Piednoir, précise que l’interdiction concerne «les compétitions départementales, régionales et nationales, organisées par les 120 fédérations agréées», fait savoir Le Figaro. Citée par le média, la proposition de loi aborde également des pratiques qu’elles qualifient de «détournements» du principe de laïcité. Elle énonce, en l’occurrence, que «l’utilisation d’une partie d’un équipement sportif comme salle de prière constituerait un détournement de son usage».
L’article 3 désigne plus expressément des habillements sportifs, qu’il considère comme un signe religieux musulman à l’image du «burkini», dans les piscines et les plages publiques. Le texte préconise de les interdire, pour cause d’«atteinte à l’ordre public et au bon fonctionnement d’un service public». Selon Francetv Info, le gouvernement soutiendra la proposition de loi, «à condition que les amendements de la majorité» soient votés.
Des interdictions de plus en plus contestées, mais de plus en plus courantes
Jusqu’à présent, l’arbitrage a été laissé aux fédérations pour interdire ou non des signes qu’elles considéreraient comme religieux, dans le cadre de certaines compétitions. Parmi elles, la Fédération française de football (FFF) ou encore celle du rugby ont déjà inclus ces interdictions dans leurs règlements. Jusque-là plus épargnés, l’athlétisme et le handball seraient tout autant concernés par ces mesures, si la proposition de loi est adoptée.
Mais officiellement, des institutions françaises ont déjà montré la voie, donnant une orientation aux pratiques depuis plus d’une année. Après une longue bataille juridique, le Conseil d’Etat a rendu, 29 juin 2023, un arrêt validant la décision de la FFF d’«interdire tout signe ou tenue manifestant ostensiblement une appartenance politique, philosophique, religieuse ou syndicale lors des compétitions sportives», conformément à l’article 1 du règlement de l’instance, qui y a intégré le principe de neutralité dès 2016.
A rebours du Comité olympique international (CIO), qui n’interdit pas le port de couvre-chef lors des compétitions, la France a par ailleurs décidé que ses athlètes ne porteront pas le voile aux JO 2024 de Paris, pour motif de laïcité. Dans le temps, pas moins de huit organisations de sport et de défense de droits humains ont été vent debout contre cette mesure, qui ne s’est d’ailleurs pas appliquée aux sportives des autres pays participants.
Dans ce contexte, le gouvernement a été épinglé par des experts mandatés par les instances de l’ONU, pour ses décisions contre le port du voile dans le sport. Selon eux, l’Etat français n’a «pris aucune mesure pour s’assurer que les interdictions adoptées par les fédérations sportives soient proportionnées et fondées sur les motifs reconnus en droit international pour justifier une limitation des droits humains».
Avec l’examen de cette proposition de loi, le débat sur la question du voile dans les compétitions sportives n’est près de s’éteindre.