Les organisations de défense juridique Due Process International et Detained in Dubai ont récemment lancé un appel pour une enquête parlementaire urgente concernant le rôle du gouvernement britannique dans la condamnation de Lee Brahim Murray-Lamrani, un citoyen britanno-marocain. Actuellement incarcéré au Maroc, Murray purge une peine de 25 ans pour sa participation au braquage du dépôt Securitas en 2006 dans le Kent, considéré comme le plus grand vol de fonds de l’histoire britannique.
Dans une déclaration publiée le 16 juillet, les deux organisations affirment que le crime a été perpétré au Royaume-Uni. Cependant, lorsque l’extradition vers ce pays a été refusée en vertu de la législation marocaine, les autorités britanniques auraient transmis aux procureurs marocains des informations policières, des dossiers d’enquête et des preuves dans le but d’obtenir une condamnation à l’étranger. «C’est un cas manifeste de poursuite par procuration», a déclaré Due Process International.
«Le gouvernement britannique a contourné ses propres tribunaux, transféré le procès d’un citoyen britannique vers une juridiction étrangère, et lui a refusé les protections juridiques dont il aurait bénéficié chez lui.»
Radha Stirling, PDG de DPI et fondatrice de Detained in Dubai, a exprimé de sérieuses préoccupations en matière de droits humains, notamment des violations présumées du droit à un procès équitable, telles que l’absence de conseil juridique lors de l’appel qui a vu la peine de Murray passer de 10 à 25 ans. «Si cette condamnation est entachée d’irrégularités, elle doit faire l’objet d’une enquête approfondie», a-t-elle déclaré.
Les organisations exhortent les députés britanniques du Comité des affaires étrangères et du Comité mixte des droits de l’homme à vérifier si le Royaume-Uni a manqué à ses obligations, particulièrement dans le cadre d’une «coopération diplomatique renforcée» avec le Maroc. «Il ne s’agit pas seulement d’un homme», a ajouté Stirling. «Si le Royaume-Uni peut orchestrer une poursuite à l’étranger lorsque l’extradition échoue, cela ouvre la voie à de futurs abus—pas seulement au Maroc, mais dans le monde entier.»
DPI a également appelé le gouvernement britannique à soutenir une grâce pour Murray : «Lee a déjà purgé la majeure partie de sa peine de prison, bien plus longtemps qu’il ne l’aurait probablement fait s’il avait été jugé au Royaume-Uni. Il est temps de faire preuve de compassion et pour le Royaume-Uni de réparer cette injustice.»
En attente de liberté dans sa cellule marocaine
Né à Londres en 1977, Lee Murray a grandi au Royaume-Uni et a passé ses premières années loin de son père marocain. Durant son adolescence, Murray a été impliqué dans des activités criminelles avec son ami d’enfance et complice Paul Allen, se livrant au trafic de drogue et aux braquages à main armée. Il a été condamné pour la première fois en tant que mineur pour possession de cocaïne et de cannabis. Malgré ses démêlés avec la justice, Murray a également poursuivi une carrière prometteuse dans les arts martiaux mixtes (MMA), se faisant connaître comme un combattant redoutable sur la scène britannique.
Toutefois, ses liens criminels ont fini par éclipser ses ambitions sportives. Le braquage de Securitas en février 2006 a marqué un tournant. Accusé d’avoir orchestré le casse, Murray a fui au Maroc quatre jours après que le gang se soit emparé de 53 millions de livres sterling d’un dépôt de fonds à Tonbridge, dans le Kent. Pour échapper à l’extradition, il a demandé la citoyenneté marocaine. Le 25 juin 2006, il a été arrêté à Rabat lors d’une opération conjointe des autorités marocaines et britanniques.
En 2010, un tribunal marocain a condamné Murray à 10 ans de prison. Cette peine a ensuite été portée à 25 ans en appel. «Il n’y a pas de bonheur là où je suis», a-t-il confié dans une interview en 2018 depuis sa cellule de prison à Tifelt. «Mais je suppose que je peux dire que je suis heureux d’être encore en vie. (…) Il y a eu des moments où j’étais assis dans une pièce à côté de personnes avec plusieurs condamnations à mort, et dans ces moments-là, vos propres problèmes semblent soudain très petits.»