Le camp Rabouni, siège de la direction du Polisario situé sur le territoire algérien, a connu hier un rassemblement inhabituel. Une centaine d’éléments des milices du Front, opérant dans la 1ère région militaire, ont déposé leurs armes et treillis devant le secrétariat général du Front et annoncé la rupture définitive avec «l’armée sahraouie».
Une protestation qui, depuis, alimente les débats entre Sahraouis sur les réseaux sociaux. Dans des messages audio, certains l’ont qualifiée «de coup d’Etat» alors que d’autres ont exhorté Brahim Ghali à «nouer le dialogue avec les militaires». Pour sa part Said Zarwal, un membre du Front installé en Suède, a invité le chef du Polisario «à répondre aux revendications des hommes sur le terrain, car le premier bénéficiaire de l’absence de dialogue entre les deux parties est l’occupant marocain».
De son côté Mahmoud Zaidan, qui vit exilé en France, a constaté sur les réseaux sociaux que la «démission» d’une centaine de miliciens de la 1ère région militaire prouve que «l’armée ne va pas bien ; les institutions ne se construisent pas avec des montage et Photoshop». Deux voix critiques de la gestion du Polisario par Brahim Ghali, mais qui ne sont pas connues pour être proches du Maroc.
Pour rappel, la première région militaire était située près d’El Guerguerate. Cette base, qui était considérée comme un «territoire libéré», est inopérationnelle depuis le 13 novembre 2020. Les interventions des drones des Forces armées royales (FAR) ont contraint les milices du mouvement séparatiste à fuir vers les camps de Tindouf en territoire algérien.
D’une mutinerie à la défection
«Ce nouveau développement était prévisible. Il est la conséquence directe du rejet du chef du Polisario d’ouvrir un dialogue avec ces militaires», explique Salem Abdelfattah, dans des déclarations à Yabiladi.
«Ils ont observé un sit-in ouvert, pendant des semaines, pour protester contre les détournements menés par leur chef de produits destinés au fonctionnement de la 1ère région militaire, dont du carburant qu’il vendait sur le marché mauritanien.»
Salem Abdelfattah
«Ils avaient lancé, en avril dernier, une mise en garde à la direction du Polisario en procédant à la détention de leur supérieur hiérarchique, mais ignorée par Brahim Ghali et les siens. Logiquement, ils ont fini par quitter la milice du Front», analyse le président de l’Observatoire sahraoui de l’information et des droits de l’Homme, basé à Laayoune.
Cette démission intervient alors que la situation dans les camps de Tindouf est confuse. La direction redoute l’effet tâche d’huile alors que l’autorité de Brahim Ghali vacille. L’homme ne fait plus l’unanimité parmi les siens. Bachir Mustapha Sayed et Oubi Bachir ont, d’ailleurs, publiquement réclamé la tenue d’une conférence pour évaluer les huit années à la tête du Front.