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Aux origines du pèlerinage de Sebaatou Rijal


Les sept patrons, appelés aussi «Sebaatou Rijal», ont occupé depuis plusieurs siècles une place centrale dans la culture, la religiosité et la spiritualité de Marrakech. Visités par les Marocains et les non-Marocains dans le cadre d’un pèlerinage censé durer sept jours, cette pratique reste largement répandue même de nos jours.

Ainsi, la visite -ou la ziara- commence mardi avec Sidi Youssef Ben Ali, l’érudit affecté par la lèpre inhumé près de Bab Aghmat. Mercredi, les pèlerins se dirigent vers la zaouia de Cadi Ayyad, située près de Bab Aylen avant de visiter, jeudi, celle de Sidi Belabbes Sebti au nord-est de la ville ocre. Vendredi, ils rendent visite à Sidi Mohamed Ben Slimane Al Jazouli. Samedi, ils se rendent à la zaouia de Sidi Abdelaziz Tebbaa, avant de visiter dimanche la zaouia d’Abdellah El Ghazouani alias Moul El Ksour. Le dernier saint à visiter est l’Imam Souhaili, inhumé près de Bab Er-Robb.

L’ordre obéit avant tout à une logique de proximité mais aussi une succession «horizontale». Selon la revue Al Mithaq, qui aborde notamment les emplacements des tombes de quatre saints, «cela [commence] par la tombe d’Al Jazouli à Riyad Laarouss jusqu’au sanctuaire de Tebbaa à El Mouassin puis vers les Qssour avec la zaouia d’El Ghazouani». «Cette logique correspond étonnement au fait qu’El Ghazouani était un élève d’Abdelaziz Tebbaa, lui-même disciple de Sidi Mohamed Ben Slimane Al Jazouli», écrit-elle.

Abou Ali Hassan El Youssi, l’instigateur du pèlerinage des sept saints ?

Bien qu’ils constituent sept personnages qui se sont démarqués à leurs époques respectives, le pèlerinage ainsi que la position que les sept patrons de Marrakech ont occupé dans l’imaginaire collectif des Marocains restent l’œuvre d’un sultan alaouite. Il est même étonnant d’apprendre que Moulay Ismail avait instauré cette pratique afin d’encourager les visiteurs à se rendre à Marrakech et contempler au passage ses propres réalisations au lieu du traditionnel pélerinage dans la région d’Essaouira.

Pour faire oublier ses ordres de destruction de plusieurs monuments de la ville, ouvrages des dynasties précédentes, comme le palais Al Badie ou encore la madrasa mérinide de Moulay Abou Hassan, Moulay Ismail entreprend «des travaux d’agrandissement et d’embellissement dans les édifices religieux», rapportent Narjess Ghachem-Benkirane et Philippe Saharoff, auteurs de «Marrakech, demeures et jardins secrets» (Editions Acr, 1990).

Les 7 tours de Bab Doukkala à Marrakech en hommage aux Sept Saints. / Ph. DR Les 7 tours de Bab Doukkala à Marrakech en hommage aux Sept Saints. / Ph. DR

Mais il avait besoin de plus. Il pense alors à des personnalités de grande influence pour attirer les Marocains vers la cité ocre. Il confie alors une mission à Abou Ali Hassan El Youssi. «Le sultan était loin d’ignorer l’ascendant de ce saint personnage qui lui avait inspiré plusieurs fois une certaine déférence», rapportait Zahra El Basri Naqrachi, dans «La Ziara, Le pèlerinage des sept saints de Marrakech». Ainsi, ce personnage quitte Fès pour se rendre à Marrakech afin de choisir, parmi de nombreux saints que la ville abrite, sept patrons où les Marocains devaient se recueillir successivement.

«On ignore selon quels critères El Youssi choisit parmi les nombreux saints qui reposaient à Marrakech, ceux qui allaient devenir les sept patrons de la ville. Mais il organisa la ziara des Sebaatou ridjal, qui consistait à visiter chaque jour dans un certain ordre la sépulture de chaque saint : « En toutes circonstances, visitez les tombeaux de ces saints en observant l’ordre ci-dessous, le Seigneur facilitera votre tâche et vous protégera ».»

Narjess Ghachem-Benkirane et Philippe Saharoff

Le pèlerinage des sept saints de… Regraga

Ce qui marchera finalement, accordant à ces sept érudits du monde musulman occidental une notoriété et amplifiant leur renommée. Et Moulay Ismail aurait fait d’une pierre deux coups : détourner l’attention quant à la démolition de plusieurs édifices et monuments des dynasties mérinide, almoravide et almohade tout en mettant fin à l’influence grandissante d’une autre région proche de Marrakech, avec sept autres saints, en l’occurrence ceux de Regraga, près d’Essaouira.

Dans l’arrière-pays de Mogador repose en effet sept saints issus de la tribu de Regraga. Il s’agit de Sidi Ilias Ouasmine, Sidi Said Essabek, Sidi Aissa Boukhabiya, Sidi Yaala Ben Touil, Sidi Saleh, Sidi Boubker Achemasse et Sidi Aissa Mouloutad. Ils seraient surtout, selon des versions de l’histoire non confirmées par les récits officiels, de Marocains de confession chrétienne qui se seraient rendus à La Mecque pour rencontrer le Prophète Mohammed dès l’apparition de l’Islam. Ils se seraient retournés à Chiadma pour enseigner, à leur tour, les principes de la nouvelle religion et ce, des décennies avant les conquêtes de l’Islam au Maghreb.

La célébration des Regraga. / Ph. collectif-createurs-essaouira.comLa célébration des Regraga. / Ph. collectif-createurs-essaouira.com

Cette version est notamment citée par l’écrivaine Mouna Hachim dans un article paru dans L’Economiste. «Dans son magistral ouvrage dédié aux Regraga, le sociologue Abdelkader Mana avait relevé à ce titre, lors de leur fameux pèlerinage circulaire printanier, des rites et des chants rappelant étrangement l’épisode biblique de la Table servie», a-t-elle écrit.

Annuellement, les Regraga célèbrent ce retour historique de ces sept saints, durant la période du printemps. Un pèlerinage est alors organisé dans le douar pour se rendre dans les tombeaux des sept patrons, rappelant celui instauré par Moulay Ismail sur proposition de Cheikh El Youssi, des siècles plus tard.





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