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A Al Haouz, les stigmates du séisme dans le secteur du tourisme rural


Avec un lourd bilan de près de 3 000 morts, l’impact du tremblement de terre d’Al Haouz s’est ressenti avec des dégâts humains, matériels, mais aussi dans les activités économiques. En effet, les acteurs locaux du secteur du tourisme ont payé le lourd tribut de cette catastrophe naturelle. Avec sa situation particulière entre les montagnes et ses paysages naturels époustouflants, la région a jusque-là été une destination pour les touristes du monde entier. Depuis le séisme, les infrastructures ont été gravement endommagées, notamment les nombreuses installations touristiques.

Faute de ressources, les acteurs du secteur se sont trouvés face à la tâche ardue de restauration, de reconstruction et de promotion de la destination Al Haouz. Propriétaire de Dar Atlas Ouadaker Amizmiz, Said El Khatach confie que le tremblement de terre a détruit la maison qu’il a héritée de ses ancêtres et transformée en maison d’hôtes, en 2000.

Dans son entretien avec Yabiladi, l’opérateur touristique a regretté d’être exclu du soutien alloué par le ministère du Tourisme aux professionnels, étant donné que son enseigne n’est pas classée et qu’il s’agit d’un hébergement touristique temporaire. «En échange, j’ai pu obtenir le soutien du gouvernement pour la reconstruction, étant donné que moi aussi j’y vivais avec ma famille», a-t-il déclaré.

Des maisons d’hôtes servant de domicile exclues de l’aide à la reconstruction

A l’instar de certains habitants touchés dans la région, Said El Khatach a confirmé que cette aide de 80 000 dirhams restait «totalement insuffisante». Après avoir reçu la première tranche de 20 000 DH, il a dû compter sur ses fonds propres pour poser les fondations du bâtiment, condition sine qua non pour obtenir la deuxième tranche du soutien public.

«C’était à la fois mon domicile principal et ma source de revenus. Mais les choses se sont beaucoup détériorées après le séisme. Aujourd’hui, je vis dans des tentes que j’ai installées pour recevoir les clients qui visitaient le refuge avant. Je reçois de nombreux appels de nouveaux clients, mais lorsque je leur parle de l’état du bâtiment et de la possibilité de les accueillir plutôt en tente pour organiser des circuits touristiques dans la région, ils sont moins enthousiasmés.»

Said El Khatach, propriétaire de Dar Atlas Ouadaker Amizmiz

Bien que les touristes aient progressivement commencé à affluer dans la région récemment, selon Said El Khatach, «la situation n’est plus la même et l’amélioration reste lente».

De son côté, le propriétaire du Gîte entre les deux Vallées, Abdelaziz Lehrim, a déclaré à Yabiladi que même si son édifice n’avait pas été entièrement endommagé, «il avait été gravement touché par de grandes fissures, ce qui a entraîné la baisse des arrivées des clients». «A la vue des fissures apparentes, beaucoup n’ont pas envie de rester», souligne-t-il.

«J’ai été très impacté par les conséquences du tremblement de terre et je n’ai bénéficié d’aucun soutien. Les autorités compétentes m’ont dit que je suis propriétaire d’une maison dans laquelle je vis avec ma famille et qu’elles ne sont responsables que de ces logements-là et non des espaces touristiques», déplore l’opérateur.

Comme Said El Khatach, Abdelaziz dépend entièrement de son gîte, ouvert aux clients depuis 2005. «Pour l’heure, je n’ai aucun moyen de subsistance et parfois je ne reçois qu’un ou deux visiteurs sur plusieurs mois», nous confie-t-il, indiquant ne pas avoir les moyens de mener les travaux nécessaires à la reprise.

Les guides ne sont pas en reste. Parmi eux, Abdellah Benchouai de l’Association régionale des guides touristiques de la ville de Marrakech, est bien conscient de la situation. «Je fais des circuits touristiques dans tout le pays, des zones montagneuses aux villes. Chaque jour, je constate l’impact du séisme sur la région», nous a-t-il confié. Le professionnel revient sur la période qui a suivi immédiatement le tremblement de terre : «Lorsque le drame s’est produit, le tourisme dans la région s’est arrêté soudainement. Beaucoup de clients ont annulé leurs réservations, ce qui était prévisible.»

«Les activités touristiques ont été initialement interrompues en raison des infrastructures endommagées. Les routes et les abris ont été touchés, certains ont été partiellement ou complètement détruits. De ce fait, les guides ont été contraints de chercher des alternatives. Nous avons changé notre destination d’Imlil à Ouirgane, qui a été moins impactée.»

Abdellah Benchouai

Mettre en valeur les particularités locales pour une reprise économique équitable

Le guide considère cette situation comme une «grande perte pour la région et pour le tourisme en général». A ce titre, il estime que le processus de reconstruction «aurait gagné à être supervisé par des spécialistes et des ingénieurs, pour préserver la beauté de la région qui attirerait davantage de touristes».

Abdellah Benchouai a ajouté que les guides organisent des visites vers Al Haouz, Imlil, Amizmiz et Tahannoout afin d’explorer les palais et les monuments historiques. Malgré son désarroi de voir ce qui est advenu de ces sites, ils gardent espoir, surtout après avoir été informés des projets de restauration. D’ailleurs, certains ksours font actuellement l’objet de travaux dans ce sens, comme ksar Oulad Abdelhalim à Errachidia. D’autres encore ont été refaits grâce aux efforts conjoints d’organisations non gouvernementales et d’associations locales, comme ksar El Khorbat à Oujdid.

L’opérateur touristique a exprimé son espoir que ces efforts soient étendus à d’autres ksours et kasbahs qui ont une longue histoire, mais dont les structures sont fragilisées en raison de divers facteurs, le séisme ayant aggravé encore plus leur état. A cause du sinistre, beaucoup sont tombés ou menacent ruine. Il a également exprimé son désarroi de l’impact de ce drame sur l’architecture amazighe propre aux villages d’Imlil, Asni et Ourika.

Dans ce sens, Abdellah Benchouai estime nécessaire que les bâtiments soient refaits avec des normes antisismiques adéquates, tout en préservant leur caractère architectural local. «La conservation de ce patrimoine est ce qui permet de maintenir l’espoir d’un retour des touristes dans la région», a-t-il affirmé.





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