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6 jours de rétention et une OQTF exécutoire, une diplômée marocaine témoigne

6 jours de rétention et une OQTF exécutoire, une diplômée marocaine témoigne

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Depuis 2018, Zahra* vit en France, où elle a suivi ses études supérieures. Après avoir décroché son précieux diplôme de troisième cycle en gestion des affaires (MBA), elle a eu l’ambition de travailler dans un pays où elle a désormais construit sa vie de jeune adulte. Mais ce sera son retour d’un séjour estival passé au Maroc qui révélera le revers de la médaille. A l’aéroport de Roissy-Charles-de-Gaulle, le contrôle de la police aux frontières (PAF) se déroule «de manière très ordinaire», jusqu’à ce que l’un des agents ressorte du bureau pour lui demander de la suivre.

Zahra* tombe des nues. Elle découvre qu’elle est visée par une obligation de quitter le territoire français (OQTF) et une interdiction de retour (IRT) pendant 40 ans. Auprès de Yabiladi, la femme de 29 ans explique n’avoir jamais été notifiée ni des motifs, ni des mesures administratives prises à son encontre. «Il aura fallu que je fasse cet aller-retour entre le Maroc et la France pour découvrir que j’étais sous OQTF, ma sortie du territoire ayant été considérée initialement comme une exécution volontaire», nous dit-elle.

Une détresse psychologique et une OQTF toujours exécutoire

Selon la lauréate, tout aurait commencé par l’absence de son diplôme récent dans le dossier de demande de d’autorisation provisoire de séjour (APS). En effet, ce titre de séjour permet aux étudiants étrangers et fraîchement diplômés de rester en France, afin de chercher un emploi ou de créer une entreprise.

Dans le cadre de ce changement de statut, il est d’usage que les jeunes diplômés joignent leur attestation de réussite aux pièces demandées, de manière à ce que le retard de remise de diplôme ne les mette dans une situation administrative irrégulière. «J’ai procédé de la même manière après m’être informée directement auprès de la préfecture, qui m’a aimablement rassurée là-dessus», nous affirme Zahra*. C’est à partir de là que la situation de la jeune femme deviendra un cas administratif inédit, auquel même les autres policiers croient difficilement.

«Au tribunal, les agents et les interprètes que j’ai rencontrés étaient tous surpris en lisant la décision administrative et les motifs, car ils n’ont jamais rencontré un cas similaire», nous confie encore Zahra*. De sa rétention, elle se souvient douloureusement de son passage devant la juge des libertés, au bout du quatrième jour. Celle-ci décide de rejeter sa demande de remise en liberté, introduite par Me Samy Djemaoun, avocat au barreau de Paris.

Au bout du sixième jour, une décision en appel permet à Zahra* de quitter enfin la zone d’attente, d’annuler l’IRT et de faire suspendre l’OQTF, qui reste pourtant exécutoire. Autant dire que la situation de la diplômée est sous une épée de Damoclès, qui l’«empêche de tout», comme elle le décrit à Yabiladi. De cette épreuve, elle s’en sort également avec une détresse psychologique.

Dans son récit, la jeune femme fait état notamment d’un harcèlement sexuel verbal avec une menace explicite, durant sa rétention. Par ailleurs, elle décrit des conditions déplorables d’hébergement (saleté, nourriture insuffisante…).

«On m’a tout pris. Je n’ai plus mes documents de titre de séjour, à commencer par mon récépissé. Ce dernier expire en septembre, sachant que l’examen de retrait d’une OQTF par le tribunal prend généralement six mois, ce qui risque de me mettre dans une situation administrative irrégulière. En attendant, j’ai reçu des offres d’emploi intéressantes mais auxquelles je ne peux pas donner de suite, vu la mesure exécutoire.»

Zahra*

Un «déni de droit», selon l’avocat de la jeune femme

Pour Me Samy Djemaoun, cette spirale résulte d’une «faute administrative» qui illustre un «déni de droit», avec «une volonté» claire de ne pas laisser l’intéressée accéder au territoire. «Ma cliente vit en France depuis 7 ans en situation régulière. Elle a étudié, travaillé, payé ses impôts. Son titre de séjour étudiant a expiré en février. Elle demande un changement de statut pour intégrer le marché du travail. Elle obtient une APS valable jusqu’au 17/09/2025. Son dossier est accepté depuis le 30/03/2025 avec une proposition d’embauche. Le 17 juin, elle est convoquée en préfecture pour une remise de titre», a relaté l’avocat, via ses réseaux sociaux.

Sur place, Zahra* apprend que «le titre est en cours de fabrication». Le 25 juin dernier, elle se rend au Maroc pour retrouver sa famille, avant son retour en France, le 9 juillet. C’est alors qu’elle se voit refuser l’entrée au territoire, «parce qu’entre-temps, la préfecture a pris en silence : – un refus de titre, – une OQTF, – une IRTF de… 40 ans, sans jamais l’en informer, sans jamais lui retirer son récépissé le 17 juin, et surtout, sans jamais lui demander de document complémentaire», a fustigé l’avocat.

Selon lui, «la préfecture lui reproche de ne pas avoir fourni son diplôme», alors qu’«elle avait donné une attestation de réussite (dans l’attente du diplôme)». Me Djemaoun fait savoir que le 8 juillet, soit la veille du retour en France, Zahra* «est inscrite au fichier des personnes recherchées» avec la mention «vous faites l’objet d’une fiche E pour interdiction administrative de retour sur le territoire national valable du 08/07/2025 jusqu’au 04/06/2065’». Cette même fiche donne l’instruction de «vérifier la situation de l’intéressé». «Si le délai de départ n’est pas dépassé, laisser en liberté», indique le document.

«Elle était dans les délais. Son récépissé était encore valable jusqu’en septembre. Et pourtant, elle a été enfermée. En résumé : Une convocation pour remise de titre… pendant qu’un refus, une OQTF et une IRTF sont signés en silence, fondés sur une prétendue pièce manquante… jamais demandée ; une décision jamais notifiée ; une fiche de recherche qui ordonne la liberté, mais que la PAF choisit d’ignorer», dénonce encore l’avocat. C’est à ce titre que la cour d’appel de Paris a estimé que le maintien de Zahra* en zone d’attente «constitue une atteinte disproportionnée aux droits de l’intéressée». Dans ce contexte, Me Djemaoun, estime «urgent de remettre l’humain et le droit au cœur l’administration».

En attendant une résolution définitive de l’affaire, Zahra* pointe par ailleurs «beaucoup de fausses informations qui circulent sur tiktok» à son sujet, en plus d’attaques racistes et de l’extrême droite sur les réseaux sociaux. «A ce stade, je me fiche des mauvais commentaires, car je sais que je n’ai rien fait d’illégal. Je suis rassurée par rapport au fait de m’être toujours conformée à la loi dans le pays d’accueil, où j’ai toujours respecté les procédures administratives et payé mes impôts quand j’avais un emploi», nous confie la jeune femme.

Au point où elle en est, Zahra* «demande surtout que justice soit faite», afin qu’elle puisse «travailler et reprendre une vie normale».

* Le prénom a été changé à la demande de l’intéressée





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